plus fort que Poutine qui affronte un ours
torse nu
poitrail en éventail
que Poutine qui affronte
une nuée d'ours
toujours torse nu
toujours poitrail en éventail
plus fort que les pinces d'un crabe
les princes arabes
plus fort qu'une meute de requins-marteaux
clouant les vagues aux bateaux
plus fort que la première puissance mondiale
et la seconde
et la troisième
plus fort que le FMI l'OMS l'OTAN
plus fort que toutes les lettres capitales
moins minuscule que toutes les lettres MINUSCULES
plus fort que les 1008 noms de Shiva
plus fort que les autoroutes
les clés à molette
à molester à moleskine
les barres à mine
à miner mouliner minimiser
plus fort que Godzilla
que le vomi fluo qui pue de Godzilla qui pète
que le coussinet radioactif de Godzilla
qui patoune Tokyo à l'atome monotone
plus fort que la CIA et solide comme un ananas
un robotéka un ninja un karatéka
solide comme un crocodile
un Nil une île un antimissile
l'ONU la CGT l'UNESCO
plus fort qu'un éléphant qu'un hippopotame
qu'un éléphant qui s'associe à un hippopotame
à dix hippopotames
qui s'assoie sur dix hippopotames
c'est toi
c’est toi Deum-Deum
le D du poing américain mâchoire à caillasse
le casse-biDoche le Détronche
du viDe-Douille de la Drille-DDécapeuse
plus fort que ça c'est toi
tu te dis
en te mates-tu dans le miroir
de ta salle de bains aussi triste
qu’un cachalot amoureux d'un sous-marin
(ouais c'est triste car
le sous-marin n'a aucun geste de tendresse)
je suis totémique te penses-tu ce matin
en te sur-gonflant un sous-muscle ou deux au passage
pour te faire bonne impression
en surjouant ta cage thoracique
en déballant des costumes de taule de toi
des costumes de fonte éteinte dans les extractions de sueurs étuvées
j’ai de la viande à revendre
te dis-tu
propre comme un sous neuf
dans ta salle de bains
muant sous une chape de buée dense
brossant ta barbe et tes cheveux
comme des champs de seigle
avant d'aller au taf
au chantier il te dit quoi
le demi-portion-fris au soleil
dégoulinant de poussière liquide
il te dit quoi
le minilingus
le boss à la gueule de jus-de-chou-rouge
caramélisé par la chaleur
d'un mois de mai qui décolle les ombres
comme des pansements suintants
d'un mois de mai fais ce qu'il te plaît
fais ce qu'il te plaît sous le ciel bleu standard
et sous le soleil brillant normal
qui déterre à la pelle volcanique
de gros jus de peau
du visage du boss de chantier
une sueur incolore en roue extra-libre
qui fait du toboggan sur son front gélifié
et sur ses joues rondes comme des boules de geisha
sauf qu'on aurait pas envie de se les mettre dans le vagin
il te dit quoi
le demi-gambas-grillé
le chef
il te dit quoi sous les grues vigilantes
sous les dieux-pelleteuses et les rois-ciments
sous les libations des camions-mélangeurs
qui suçotent
prémâchent le monde
sous le gavage sacrificiel des bétonnières
sous les enduits nutritifs
qu'est-ce qu'il te dit
t'es en retard Vincent Deumelemester.
t'es encore.
de nouveau.
comme toujours.
comme jamais.
en retard.
or :
> y'a des murs à murer
> y'a des ciments à cimenter
> y'a des cailloux à caillasser
qui n'attendent que toi à l'heure où tu dois être là
pour murer cimenter caillasser
on va pas pouvoir continuer à te garder comme ça
ici on remue ciel et terre
dans des maelstroms de gravas
on transforme l'eau et les forces natales
le feu l'électricité le frottement
les aciers les craquement les poutres
on mélange tout ça dans un cloaque infernal
d'oiseau élémentaire
pour produire le monde de demain
et toi tu arrives en retard
alors nous allons devoir te foutre à la porte
qu'il te dit de sa bouche de jus de tomate
et tu regardes le ciel bleu comme une grosse clé de huit
qui resserre ta rage
et les écrous des quelques nuages
crick crick crick
et la grosse cheville solaire
qui tient le monde sur l'étagère de la vie
t'es viré qu'il te dit et
t'as envie d'attendrir sa gueule de paupiette
de terrasser son air certain
de lui faire un masque de sang séché
ta rage finit par se glacer et devenir comme
un oiseau au cou croqué contre une fenêtre
qui dégringole au fond de toi
avec tous ses os d'oiseau et ses organes vitaux d’oiseau
qui se fracassent au fond de toi
tandis que la masse de plumes tourbillonne et te jonche
avec toutes les autres carcasses qui te compostent déjà
celles de toutes tes résignations d'avant
tout ce qui voulait voler en toi de ses propres ailes
et qui se ramasse à la pelle au fond de toi
alors tu te défends tu promets tu jures
plus jamais tu te jures plus à l'avenir
ça ne se reproduira
les humiliations la dégueulasserie du monde
les choses que tu ne comprends pas
qui t'échappent et te reviennent pan dans la gueule
mais de toute façon l'homme-viande-crue de boss-tartare
prend sa décision
arrêtée.
bien dans l'axe.
droite.
insécable.
entière.
indéboulonnable.
et son regard exprime une chose qui ne changera pas.
indivis.
t'es viré dit-il
alors Deum-Deum
s'apprête à remballer
la fête est finie
comme un paquet de gruyère vide.
dans un autre monde parallèle, Deum Deum découpe la tête de son boss avec un canif (c'est long mais faisable), se macule d'éclaboussures de sang bulbeux, ensuite il réduit la tête avec les meilleures techniques de réduction de tête apprise sur internet (MOOC « comment faire une tête réduite avec la méthode ancestrale des Shuars »), avant de la suspendre à son rétroviseur, telle un trophée, tout en prenant soin au préalable de la baigner dans une solution lavande pour que ça fleure bon tout partout dans l’habitacle.
confortablement installé
dans la vrille
des tourbillons de bière
cumulonimbus de mousse
cunnilingus d’orge
Deum noie sa noirceur
au bar l'Extrême
amas dystopique de
lumières effondrées dans du jaune glauque mal léché
sous des musiques de taule fraîche
flageolantes d'acier
féeries aux crocs de fer
brasse ta lose de naze
et tes derniers euros
Deum Deum
en pensant à
des mondes perdus et des chemins clandestins
des nuits âcres d'ocre
des bleus foutus et des rouges rapetissés
Deum Deum petit alcoolo des causes qui n’en valent pas la peine
Deum Deum te voilà au chevet des pompes à monts et merveilles
des bavures de fûts
tu t'en fous du boulot
viré moi ? Rien à battre
le monde devient peu à peu
un grillage barbelé entortillé autour de la vie
comme des spaghettis autour
d'une boulette de viande
le monde devient peu à peu
une somme de murs qui se referment
et les cadenas qui vont avec
qui calfeutrent les langues
qui clouent les paupières
le monde devient peu à peu
un mille-feuille d’images surveillé par un mille-pattes de caméras
le monde devient peu à peu
un distributeur de plans culs
un tuyau hormonal qui déglutit
des grains boursouflés d'antibiotiques
des pilules de gémir des pilules de gésir des pilules de plaisir
tu t'en fiches du boulot on t'a mis ça dans le crâne comme
des hamburgers
que c'était l'idéal
la petite vie tranquille
pépère
tu le dis à ton cousin Vivian
qui boit avec toi ton licenciement :
le monde devient une grosse déchetterie même pas au sens figuré même pas pour de faux l'océan pue le jus de poubelle, les forêts pourrissent et les animaux se transforment en mouche, les mouettes bouffent la merde des hommes les ours blancs bouffent la même merde que les mouettes, et les êtres humains commencent à ressembler à des ordures, des ordures pleines de cancer des visages qui sourient comme des sacs plastiques des cerveaux jetables même les rêves maintenant ressemblent à des crevettes sous-vide avec une gueule pas fraîche quelle différence quand on meurt on nous incinère et chaque jour on nous trie on nous recycle toi t'es une ordure utile à la société toi t'es une ordure inutile j'en ai plein le cul.
Vivian approuve d'un big up ce stand up.
(pendant ce temps-là au sommet de l’UE des décisions fondamentales sont prises pour le sort des choses en général
la présidente allemande se retourne face contre
le mur-crème crépi de sa chambre bavaroise
elle est à peine couverte
un tiers dévêtue
avec sa peau de châtaigne glougloutante
flanquée de frissons
et d'ourlets somnambules
avec ses yeux qui se nacrent
dans les délices de la demi-pénombre
et sa bouche
fraise tagada
qui murmure
sur les plis de son expiration
et
tandis que juste derrière l'ombre benoîtement sensuelle
du président français de la république qui consolide la relation
franco-allemande
dans la festissure fuligineuse de son cul)
dehors à la fraîche avec le cousin vous fumâtes un pétard
toi Deum Deum à peine quelques taffes fluettes
parce que t'as la gorge en porcelaine
dans un magasin d’éléphants
et la fumée rogne rageusement
comme du papier de verre
et ta voix ressort après
en chair à saucisse
marmelade de bœuf
virer comme une grosse merde pas propre !
ta colère ressemble à une endive
prête à rompre
tu vas pointer à Pôle emploi
dit Vivian
et j'ai réfléchi à un truc sur Pôle emploi
écoute ça...
si Pôle emploi trouve du travail à tout le monde
alors ils n'auront plus de travail
du coup qui leur en trouvera ?
s’interroge-t-il et
il a toujours des interrogations
à chier
(pendant ce temps-là
au sommet international de l'ONU
le président du Brésil délivre
sa bite immense de son slip de bain mauve moulant
et dans le jacuzzi-cocktail fleuri de roses roses
patauge sa langue globale au cœur du
vagin pulpeux de la présidente du Pentagone
pendant que mate
avec une sueur de bûcheron psychopathe
et une langue en rouleau de printemps
le roi des Chinois
dans son kimono de soie
tandis que le ministre d'Australie
joue avec des petits sous-marins insubmersibles
qu'il interfère dans l'anus figuratif
du PDG des plates-formes pétrolières du Groenland)
Vivian propose un truc
avec un peu d’aléas et beaucoup d’alcool dans le pif
et si on allait péter quelques trucs !
sur le chantier ?
pour pas qu'il s'en sorte comme si de rien n'était
et ça te dit bien ce qu’il te dit de mal
alors vous prenez ta caisse Deum Deum qui sent l’échalote
(c’est à cause de ton cousin qui te refile des bacs de légumes
de son jardin perso
tous les dimanches)
direction le chantier ---->
les grues s'apparentent
à des ossements de dieux morts illuminés
avec un bout de chair décomposée qui pendouille
les pelleteuses gisent
la langue exorbitée
Vivian commence à se dégonfler
il faut qu'il pompe le pouls de ses veines
pour regonfler sa carne trouillarde
rondouillarde
mouillette
tandis que Deum Deum tient le bon bout
le solide leader chips
il défonce à flux de grosses pompes de sécurité
le grillage qui finit par céder
et ils se glissent sur le chantier
puis grimpent un tas de briques jusqu'à un engin de forage
Vivian revigoré sort alors un couteau
et décolle des lambeaux de cuir du siège conducteur
avec une frénésie palpable
à la sueur qui s’exfiltre de son front
et à son sourire de fou mental
Deum Deum réfléchit
prend une brique
et lance la brique
sur une fenêtre
l'impact forme
une gerbe neigeuse
avec des granules de glace
sur le sol
Deum Deum est très content
c’est quoi ce bruit ?
flipette Vivian
mais Deum Deum est dans son grand concerto de briques
en bam majeur
boum mineur
allegro badaboum
t’as capté ce bruit ?
Deum Deum lâche sa brique et écoute attentivement
avec un air de vide intersidéral
dans les yeux
et une mâchoire
contractée comme un mollet de kangourou
quelque chose gratte
remue
une grosse bête qui remixe la terre
ça doit être un gros blaireau
émet à titre d’hypothèse Deum Deum
qui n'y connaît rien en blaireau
non non plus gros…
Vivian s’avance vers un tas de gadoue et d’argile
tranché comme une motte de beurre
par les engins
il s’agenouille et tend l’oreille
quand tout à coup.
soudain.
sans crier gare.
à l'improviste.
un bras terreux inattendu
se dénoyaute du boyau de boue
agrippe Vivian qui se met à crier sous le coup de la surprise
en perd son couteau
et aussi vite que rapide
se retrouve sucé dans le cloaque argileux
comme une sorte de plug en forme de Vivian
Vivian ? Viiiiiiiiiviaaaaaaaaan ?
tente tant bien que mal Deum Deum
il regarde à travers l’ouverture
ne voit pas son cousin mais constate plusieurs choses matériellement vraies
il y a une galerie qui mène quelque part
et ça sent les frites... ?
(bizarre)
bon
quand faut y aller…
il chope le couteau
met son corps en boule
comme une pelote
et s’enfonce inopinément
dans la cavité
aux parois saumâtres
pleine d’humidité pâteuse
d’obscurité crasseuse
de cauchemars brunâtres
et de parfum gras de friture.
s'enfoncer là-dedans n'est pas une mince affaire
c'est pas finger in ze noz
surtout quand il faut le faire
avec une carrure carrée
comme celle Deum Deum
le voilà maintenant
un crapaud dans une poche de vase
à la recherche de son cousin
siphonné par une main moche
dans un trou mou
y'a pas à dire le destin fait des petites dégueulasseries anxiogènes parfois
il y avait peu de chance ce soir qu'un bras chope son cousin
c’était aussi peu probable
par exemple
qu'une moule s'accroche à un avion
pour partir en vacances
à Atlanta
parce qu'elle aurait de la famille
une cousine
du côté de sa mère
l'argile boueux enrhume sa transpiration
ses cheveux se métamorphosent
en œufs de grenouille
ses poils se coagulent
en amas post-graisseux
néo-poisseux
et sa gueule barbue dégouline
de boulettes d'argile copieuses
quelle journée de merde !
d'abord il se fait virer comme un gros caca pourri
maintenant il patauge dans un intestin qui sent la frite
après 20 à 30 minutes de rampe-marche
de glisse-glu
de prise-poisse
d'inspirations entortillées de vers de terre
à s'éclairer difficilement avec sa minable lampe de poche de smartphone nul
il déboule d'une traite
dans une cavité volumineuse
comme s'il naissait
alors qu'il est déjà né
et sur le côté
un tas d’écrans
genre une cinquantaine
pas moins
et un type qui pianote sur une console
regarde des synthèses
d'un œil analytique
prélève des échantillons
des études et des rapports
parfois y’a des warning sur les écrans
des gros warning rouges
bouillonnants
avec les lettres jaunes hystériques
alors Deum Deum s’approche
délicatement
comme un nénuphar en polystyrène
et interpelle le type
mais qui t’es toi ?
le type se retourne
il ressemble
comme deux gouttes d’eau
d'un même nuage du même orage
sur deux pétales identiques d'une fleur unique
au ministre de l’intérieur
des nations intériorisées
heureuses
mondialement
en elles-mêmes
ah vous êtes là !
dit le ministre de l'intérieur
j’étais absolument certain que vous viendriez ! Je vous observe depuis maintenant six mois ! J’expérimente sur vous et sur d’autres individus une nouvelle forme de collecte de data-données en disposant à l’intérieur de votre organisme des nanos-machines qui nous communiquent en live vos indicateurs hormonaux et votre état de santé global et les séquelles dans votre urine et les chimies de votre consanguinité et les nomenclatures de vos neurones, à partir desquels nous agrégeons des bilans chiffrés et des statistiques fluctuantes sur l’état symptomatique de votre organisme. Je peux par exemple déceler les changements d’humeur, les facteurs de stress, les déficits comportementaux et le taux de violence subséquent, c’est carrément cool. Et aussi je peux analyser ton caca.
tu veux dire que tu m’as foutu un truc à l'intérieur de moi ? Lui dit Deum-Deum intérieurement estomaqué
oui exactement, je ne sais plus si tu te souviens du kebab kefta salade-tomate-oignon acheté à Pita Pacha Nabab Kebab le 24 septembre de l’année dernière ? Il était 6h tu revenais d'une cuite mémorable de chez Seb. Sans le savoir tu as ingurgité des nanos-robots hautes fréquences à processus disruptif.
alors Deum Deum repense à ce kebab
qui était vraiment délicieux
puis regarde le ministre de l’intérieur
qui veut être encore plus à l’intérieur
des gens
au fond d’eux
au cœur de leur cul
au flux de leurs sucs
qui veut être
dans les nids à poussière des paupières
les circonvolutions intestines des intestins
les nacelles des cheveux
les totottes
qui veut être
sous les ongles gris pouilleux
qui veut être la crasse noire des ongles gris pouilleux
qui veut être au creux du coquillage des oreilles
mélangé aux crottes de nez
englué dans les aisselles
noyé dans les nombrils
qui veut être
à l’intérieur des globules
des bites et des chattes
aux lisières des pancréas
qui veut s’envaser sur la vessie
et faire des rêves dans le cerveau
le premier ministre veut faire ses rêves dans le cerveau des gens
Deum se dit qu’il n’aurait jamais dû manger ce kebab
mais après ce n’est pas la faute du kebab
il s’approche des écrans
et il ne voit qu’une espèce de couloir spongieux
type vidéo de vasectomie
50 nuances de conduits gluants
magnifique n’est-ce pas ? Votre colon il est là (le ministre désigne un des écrans) et vous voyez au fond c’est votre petit anus hihihi on pourrait presque me voir à travers votre cul !
alors Deum Deum regarde la vidéo live de son colon
puis le visage live du ministre
et il se dit
que ce n’est pas loyal de mettre quelque chose dans l’intestin de quelqu’un sans le lui demander
DU COUP COMMENT ON RETIRE DE MON CORPS CES NANOS-MERDOUILLES ?
pas d’inquiétude ils se bio-dégradent en ce moment même. Nous allons pouvoir passer à l’étape deux du projet, je vais vous injecter la toute nouvelle gamme robotique derniers cris pour encore mieux te connaître dans les moindres recoins de ton métabolisme.
bof
pas prêt de se laisser faire
de se la faire carrer en triangulation
Deum Deum décroche un crochet vers le ministre qui tient une seringue
énormissime
(on dirait un bazooka seringue)
mais le ministre esquive comme une savonnette
tant pis je vous forcerai à être plus ou moins libre selon les contextes socio-économiques
il appuie alors sur un bouton
du tableau de bord
et un bras cadavérique
s’extrait de la glotte de la grotte
ensuite tout un corps pourrissant
et Deum Deum reconnaît
le ministre de l’écologie et des arbres morts
avec une chair toute triste en hématomes puants
rutilante de pus épais comme de la mayonnaise
constellée de giclettes de sang
il pue à trois kilomètres à la ronde
une odeur de gaz dystopique
un autre corps émerge de la diarrhée tourbeuse
c’est le ministre de la culture et des petits fours
et un autre encore
le ministre de la cohésion sociale et de l’Ennemi Intérieur
un tas de zombies ministres à la botte du ministre de l’intérieur
qui veulent immobiliser Deum Deum
pour sa petite piqûre
à la seringue bazooka
meuh bon
Deum Deum a plus d’une serpillière à son manche
alors il commence par faire la grande roue
mettant dans le vent le ministre de l’écologie et des eaux saumâtres
puis roule-boule
laissant sur le carreau le ministre de la culture et du champagne
enfin pirouette
échappant à l’étreinte du ministre de la cohésion sociale et des prisons
et parvient jusqu’au ministre de l’intérieur et des murs et des portes blindées et des matraques et des caméras et des flashballs et des lacrymos
lui subtilise la seringue
et la troue dans son œil vigilant
alors le ministre des intérieurs explose comme une grenade de dispersion
éparpillant ses petits boyaux constrictors
ses petits lambeaux de chair fumigène
ses morceaux de cervelle barbelée
tandis que les zombies s’atrophient en de petites flaques phosphorescentes
bon ça s’est fait
reste encore à retrouver son cousin
après quelques tâtonnements erratiques
Deum parvient à un autre goulot d'étranglement
où se juguler
allez en avant
pas perdre le fil
tenir la corde par le bon bout
(le cousin
en tout cas
il a intérêt à payer son verre
et aussi à financer un nouveau froc
une nouvelle chemise
ils sont bien salopés maintenant
les vêtements de Deum Deum
on dirait des éponges pour nettoyer le cul des vache
au salon de l'agriculture)
on passera les détails sur la terre qui suppure
pour arriver directement jusqu'à une nouvelle cavité
cette fois plus minérale
à croire qu’il s'est bien enfoncé maintenant
dans les gorges de la terre
devant lui se tient une putain de devanture
de Fast Food
frontispice électronique tout clignotant tout étincelant
et putain ça tombe bien
il a justement une dalle du Mont Olympe
à faire gargouiller les nuages de spaghettis de foudre
en même temps il se dit qu'il y a sûrement aiguille sous broche
il est pas con
il a une force de pré-sensation intuitive assez unique
on ne l'explique pas
mais là il se dit
que fout un fast food ici ?
il a tellement la dalle...
l'impression qu'un hameçon lui scotche les tripes
à l'envers dans son ventre
puis la grosse odeur de burger qui déchiquette l'air
MIAM MIAM MIOUM
il fonce à l'intérieur
dans le cœur chaud des lumières
le carême d'odeurs grasses
déjà c'est climatisé
et la patine de sueur sur sa peau se rafraîchit
instantanément
ça fait du bien
un bien fou
il est dans une bulle de limonade
une feuille de menthe
un iceberg
c'est trop cool
youhou !
il y a
du monde
à l’intérieur
des gens qui viennent de partout
des quatre coins de tout partout
des Canadiens des Brésiliens des Cambodgiens des Marocains
des Russes des Italiens et des Ivoiriens
et des Japonais
des Écossais
un mec déguisé en dauphin
une star de la télé-réalité
un Suisse
un Italien d'origine portugaise
Jack Nicholson
le sosie de Jack Nicholson
ou alors deux sosies de Jack Nicholson
un mec déguisé en spider-man
un mec déguisé en Clark Kent
un Polonais
Jennifer Aniston
ou alors l'actrice porno qui ressemble
à moins qu'il confonde avec Jennifer Lopez
mais est-ce que Jennifer Lopez a une actrice porno qui lui ressemble ?
Marc Zuttenberg
ou alors son cousin
ou un ami de sa femme
son frère jumeau
WTF cet endroit se dit-il
WTF ces gens
WTF
MAIS QUEL DOUX PARFUM DE VIANDE ET DE FRITURE !!!!
(alors on s'en tape en gros)
(les questions c'est pour ceux qu'y ont le ventre plein)
(Vivian serait là il aurait kiffé sa race
en mode plombage de panse)
(à la limite Deum se fait une petite bouffe
glane quelques infos utiles
où il est c'est qui tous ces gens qu'est-ce qu'ils font de leur journée sous la terre etc.)
il commence à faire la queue
mais très rapidement il se montre indécis en contemplant
les écrans chryséléphantins
qui présentent la gamme de burgers et de patate en friture
comme des dieux sensationnels
il n'arrive pas à choisir
et ne choisira de toute façon jamais
parce qu'il est rapidement déconcentré
par le jeune serveur enrobé de cellophane qui se tient face à lui
et qui prend sa commande
que puis-je vous servir ?
(le mec est couvert de la tête aux pieds de cellophane)
(on dirait un être humain sous-vide)
(c'est quoi ce délire???)
(il est blanc comme un linge)
(il est chauve comme un singe)
(c'est pour la rime un singe c'est pas chauve)
(et un singe c'est pas mauve)
(et sous sa combi il est entièrement tout nu
genre la bite comprimé
par la membrane comme un poulpe bizarroïde
les tétons asphyxiés rouges comme des œufs sur le plat au paprika
et il respire à l'aide d'un gros tuyau souple
relié au plafond rigide)
(on dirait qu'il veut échapper au virus de la peste)
(ou à une contamination sexuelle extraterrestre)
(il est prêt à prendre la commande ses doigts anxieux se tiennent
en surplomb de l'écran qui se reflète sur sa poitrine
comme un spectre fluorescent
une âme de méduse)
Deum n'a plus faim
beurk
que puis-je vous servir ?
s'impatiente le serveur qui veut servir sachant servir
alors Deum lui pose toute une rasade de questions pourquoi :
pourquoi vous êtes emballé dans du cellophane ?
pourquoi vous êtes tout nu dans du cellophane ?
pourquoi vous êtes ici sous-terre tout nu dans du cellophane ?
pourquoi vous avez un tuyau accroché à votre cellophane ?
et l'employé met aussitôt fin à l’interrogatoire de Deum
c'est pour l'hygiène monsieur c'est dans notre charte « GoodFood for BetterWorld without vomiting and good life forever and more »
de sécurité alimentaire
on y déroge pas
le restaurant étant ouvert 24h/24h nous portons continuellement
cette combinaison
sauf pour dormir
(à cet effet nous disposons d'une chambre de quarantaine à l'arrière)
l'objectif c'est qu'aucune de nos bactéries
ou peaux mortes
ou rétrovirus
ou mucus
ou lupus
ou copeaux de pipi
ou dépouilles de squames
ou reliquats de glaire
ou plâtras de caca
ou liquide rachidien
ou lipide rachitique
ou salive
ou sébum
ou pluie de liquide de sexe
ne puissent s'immiscer dans la bascule de la bouche nos clients
ou même dans leurs cheveux au parfum de mandarine
ou même dans leurs yeux rêveurs
ou même dans leurs ongles nacrés
ou même dans leur épiderme doucereux
ou même dans leur derme crémeux
ou même dans leur cervelle inventive
ou même dans leur cul cool
ou même dans leur nez pas nul
ou même dans leurs poils pubiens plus que bien
il faut maintenir une séparation stricte
et inébranlable
Et le tuyau ? demande Deum Deum
la circulation en vase clos de l’air recyclé et purifié
que puis-je vous servir ?
Deum Deum est pensif
il se demande s'il a envie d'accepter un burger
perpétuellement préparé par des employés sous-vides
qui respirent au travers de tuyaux d’arrosage
avec des yeux comme des gants en caoutchoucs
et des visages cryogénisés
est-ce que ça se fait d'accepter des burgers d'employés sous-vides
ensuite il regarde autour de lui et se rend compte
que tout le monde trouve ça normal
même que le mec qui attend derrière lui
il lui dit que le burger au guacamole est terrible yeah
alors Deum Deum a une poussée de ras-le-bol imprescriptible qui
lui grimpe entre les viandes et les omoplates
il en a plein le cul de toutes ces conneries
alors il attrape le serveur lui décapsule son tuyau
lui déchire sa combinaison
pour lui décalotter sa tête
alors tous les clients hurlent en courant vite partout
à tous les étages
de chaque horizon
le fast food se vide en deux temps trois évitements
parce qu'on a peur des maladies dans le guacamole
la cirrhose et le chikungunya
et les quatre employés se retrouvent seul dans le baba
l'employé tout nu pleurniche dans un coin
il râle comme un tamagotchi
qui va mourir dans son caca
Deum Deum s'approche comme si de rien n'était
plus discret qu'un ninja déguisé en nénuphar
et l'employé le regarde avec un regard aussi triste
que celui de Roméo qui a cru que Juliette était morte mais qu'elle ne l'était pas et qu'il meurt et qu'elle le voit mort sans le croire et qu'elle meurt pour de vrai
j'ai perdu mon job à cause de vous maintenant
comment je vais faire pour
payer mon logement de quarantaine ?
sale gros con nique ta mère
alors Deum Deum s'accroupit devant lui
pose sa main sur son épaule blanche molle
et lui dit
le soleil est à tout le monde alors
ne laisse personne te dire à quel
morceau t’as droit
fier de sa punchline pseudo-poétique pour twittos en mal de like
il se casse
(sans se retourner)
(genre cow-boy)
faut vraiment avoir la chance
qui fout le camp en Australie
pour se retrouver le même jour
licencié
et six pieds sous terre
à respirer de l’air mort
plein de vers de terre et de cadavres de lucioles
et d'os dégueulasses de stégosaures et de racines monomaniaques
et de nappes phréatiques plombées au mercure
et de zombies de taupes
et de roches fondantes comme du caramel mou
et de magnifiques bombasses en tuniques moulantes semi-transparentes qui
se pourlèchent entre elles le vagin tout en se titillant les tétons
(ah non ça c'est une hallucination)
(il fait chaud)
(comme dans un four à pain)
(ça crée des bugs dans la matrice)
une fois en dehors du fast-food
il emprunte un conduit assez large
pour se tenir debout
qui le mène jusqu’à un escalator
putain c’est cool ça
une petite pause
le temps de bien mettre à plat les organes
l’estomac au bon endroit
les tripes au bon tripot
et réinjecter des idées dans la cervelle
défroisser les muscles bien noués
l’escalator s’y prête bien
il monte avec le corps
sans qu'on y fasse rien
bon bon
le plan...
1 -> Je récupère le cousin
et ensuite il me doit un verre de bière
deux même…
pourquoi pas un resto ?
en plus Vivian a des tickets resto
pourquoi pas le Shiba ?
un chinois avec buffet non stop
infinite loop
de quoi être submergé
de teppanyaki de nems et
de vin rouge atroce
il n’aura pas le choix !
je me suis décarcassé alors il me doit un remplissage
sinon je lui fais la gueule jusqu’à la fin des temps
2 → on verra après le 1.
une fois en haut de l’escalator
il est assez surpris de découvrir une immense cavité
d’une hauteur vertigineuse
qui donne le tournis
le vertige inversé
et on se sent minuscule
on se sent chétif
on se sent une brindille sous une tempête électro-magnétique de magnitude 18
on se sent comme une petite musaraigne dans un trou à rat
on se sent comme un grain de riz minable dans un tas de grains de riz ridicules
on se sent comme une étoile prise dans une toile d'araignée
comme une tête de girafe dans la trompe d'un éléphant lui-même dans la narine
d'un rhinocéros
un gros matou gras dans une minuscule boîte de Schrödinger
les parois sont éclairées avec des torches led
des milliers de torches led
bien criardes
qui dégueulent des flots de poudre d’amande enchantée
contre la roche drue
et au milieu un pilier de verre pur
flamboyant
une colonne de cristal
c’est un ascenseur
encore heureux que ce ne soit pas des escaliers !
se dit-il
parce que ça a l’air vachement haut
et c’est épuisant de monter des centaines de marches
on finit disloqué par l’effort
une sorte de tranche de pain fantomatique qui barbote avec des canards spectraux
les poumons comme des abricots secs
dans des bouches de mémés sans dent
ET DU COUP l’ascenseur c’est le pays magique de la facilité merveilleuse
à l’intérieur il n’y a qu’un seul bouton unique
c’est plus simple aussi
avec plein de boutons il faut savoir où l’on va
et lui ne sait pas où il va
donc avec un bouton il est certain au moins
d’aller où il va
tout ça pour dire qu’il presse le bouton et l’ascenseur monte
irrémédiablement
l’ascenseur monte
tandis que la roche à l’extérieur descend
et que Deum Deum reste au même niveau
c’est incroyable
il fait chaud comme sur un grill
Deum Deum serait une sorte de gros tacos
mais alors un très très gros tacos
un king tacos
qui dégoulinerait d’haricots rouges dodus
et de piments qui brûlent
ça monte
c’est long quand même
c’est hyper haut
en plus il n’y a rien à voir
parce que la caverne
ressemble à une caverne
constamment
et à rien d’autre
ça monte
il règne dans la cabine une odeur indiscernable
qui ne laisse aucun goût en bouche
ça monte
cet épisode de l’ascenseur
est particulièrement
ennuyeux
à plus d’un titre
d’ailleurs Deum se fait chier royalement
en soi c’est normal
il n’a rien à faire
ni rien à dire
ni personne avec qui partager quelque chose
et même s’il y avait quelqu’un à qui dire quelque chose
comme il n’a aucune impression particulière à partager
il resterait silencieux
et l’autre personne se demanderait alors s’il ferme sa gueule
parce qu’il n’a rien à dire ou si c’est parce
qu’il veut garder ses impressions pour lui
djing tchoup psshout vroum paaam
la porte s’ouvre
il est arrivé
les carottes
et les navets
et devant lui c’est
WTF ???
:/
:3
un gigantesque open-space
démentiel
de malade
tape à l’œil
plein la vue
du lourd
de la pastèque et du parpaing
un giga open-space
qui plonge tête la première
dans une cagoule de lumière sans fin
à l’horizon
et puis des bureaux de partout
qui poussent comme des champignons
des champignons radioactifs
des bureaux pullulant de gens fourmillant de joie
et qui dégorgent des rires comme des mobylettes
comme des nuages de crevettes
comme des gangs de mouettes
on dirait qu’on leur a greffé
un coussin péteur
à la place du cerveau
se dit Deum Deum
ils se tirent les uns sur les autres
avec des
cartouches en mousse jaune
et ils crient des aïe surjoués
aïe
aïe aïe aïe
des ouilles imbus
ouilles
ouilles ouilles ouilles
et ils jouent au baby-foot aussi
au ping-pong notamment
à la playstation entre autre
et il y a des poufs géant XXL
on peut s’y jeter comme une mouillette dans un œuf
il y a des cubes de réunions aussi
transparents
des cubes à orgies collaboratives
remplis parfois de mousse rose
fuchsia
tropicale
jus d’orange
ou de spots technicolors
rubiconds
émeraude
pastels
l’air partout embaume
la tarte à la rhubarbe et le déo hibiscus
c’est quoi ce merdier ?
s’interroge Deum Deum
il s’avance entre les bureaux
avec une drôle de sensation dans le ventre
la sensation de qu’est-ce que je fous là
la même sensation par exemple
qu’un type déguisé en sushi dans un restaurant japonais qui affiche complet
ou qu’un type déguisé en grizzli femelle en pleine forêt un jour de
pollen et d’hormones
en avançant vers il ne sait pas trop où
Deum reçoit un petit fusible en mousse
sur la joue
et un mec habillé en t-shirt
siglé
freedom forever
éclate de rire parce que c’est lui qui a tiré sur le visage de Deum
et il trouve ça vraiment drôle
alors Deum le chope comme une espèce de Pokémon débile
et le gars devient tout blanc
un vrai visage de banquise
avec de grosses gouttes comme des phoques qui dégoulinent
c’est quoi ici putain ?
demande-t-il
et le mec blanchâtre
grelotte quelques phrases
c’est la formation…
la formation de quoi ???
euh… la formation en général
en général de quoi ?
bah… euh… la formation… j’explique…
« Aujourd’hui les entreprises évoluent de manière permanente dans un contexte d’ouverture à la concurrence et à la compétitivité. Tous ces changements sont liés aux progrès scientifiques et technologiques, l’évolution sociale, aux changements des habitudes dans l’environnement au travail et dans la vie au quotidien. La formation en entreprise présente plusieurs enjeux professionnels. Cette dernière est principalement tenue de suivre et prévoir les mutations des organisations, anticiper et identifier ces mutations, mettre à disposition des dispositifs de formation adéquats et établir des méthodes cohérentes avec les personnes à former. Par ailleurs les intérêts de la formation pour les salariés sont nombreux, entres autres : être compétent et efficace (un salarié bien formé gagne du temps) et développer la motivation des salariés pour progresser dans l’entreprise. Changer de poste, d’entreprise, obtenir une promotion, se réorienter ou se perfectionner : ces aspirations font parties intégrantes du quotidien des salariés. Et la formation professionnelle constitue l’une des pistes pour répondre à ce constat. »
Deum prend une grande respiration
avalant toute l’âme blanche du gars comme un salsifis
le type prenant conscience que sa réponse n’est pas satisfaisante
tente un coup de poker
sinon vous pouvez aller au bureau du chef de la formation
il pourra vous renseigner plus particulièrement
je vais pas me priver
se dit Deum.
c’est où ?
Deum traverse l’open jungle
dans la direction indiquée
il a précisé au gars
si jamais tu m’envoies vers nulle part
je reviens de nulle part t’envoyer à la case départ
(content de son tacle
il repart comme un prince éthiopien)
alors Deum traverse l’open fête
à gogo
il y a un mec déguisé en Batman
qui dab
un autre avec une bite dessinée au feutre sur le front
j’ai raté une mise en prod c’est mon gage :D
dit-il à Deum
m’en fous
dit Deum qui n’en a rien à battre
il continue son chemin
serpente entre les serpentins
les balles en polymère
les canards en plastique
les trottinettes
enfin il parvient
à s’extraire de tout ce suc collant rose
de joie prolifique
cette potée du bonheur
aux agrumes de gaieté
il fait à présent face à une porte en verre teintée
dans un cube en verre teintée
« Bureau du
Meilleur boss de tous les times »
lit Deum en inscription
en se disant que ça doit venir d’un mug
à l’intérieur un mec dont il reconnaît automatiquement
le bras
c’est le même bras qui a aspiré son cousin dans les
entrailles funéraires de la terre
comme un anus inversé
pour l'emmener on ne sait où
alors qu'ils s'amusaient bien tous les deux
à bousiller le matériel
hachurer les sièges éjectables
crever l’œil des pneus
édenter les fenêtres
dépouiller les pelleteuses
c'était symbolique
(symbolique parce que de toute façon maintenant les patrons ils ont tout foutu leur thune dans des serveurs aux quatre coins du monde et ils copient-collent leur fortune chez cloud dans les nuages limpides à six mille mètres de la terre, ils ctrl-c ctrl-v les chiffres de leur tune à l’encre azerty sur le cul de Dieu, sur le ciel bleu au fer rouge hexadécimal, et tout est plus diffus et tout est plus impalpable comme l'ombre de Lucky Lucke et tout est plus aérien intactile, ils ont donné des ailes à leur argent et il stationne à hauteur d'airbus A320 milliards et ils déversent des billions de litres de merde de pisse et de liquide de bite et de chatte de leur cloaque unique, le gigantesque cloaque unique des riches, l'organe seul avec lequel ils imprègnent le monde de leur territoire et ils connectent leurs cervelles à toutes les bases de données et ils baisent dans des piscines de pixels, dans des piscines d’entrailles virtuelles et ils sont comme des aliens qui poussent dans nos bas-ventres digitaux consuméristes et personne ne nous entend cliquer dans l'espace.)
et au bout de ce bras il reconnaît
l’épaule
et au-dessus de l’épaule il reconnait
le chef de chantier
habillé avec un t-shirt rigolo
où on voit un tricératops
en tenue hawaïenne respectueuse des traditions vernaculaires de la population archipélagique
(en gros des grosses fleurs et des beaux baobabs galbés)
faire du surf
au creux de la vague
épluchant quelques copeaux d'écume
et pourléchant un esquimau à l’abricot
c’est quoi ces conneries
où est mon cousin ?
le chef de chantier se lève
sourit
comme on débraille un froc et qu’on sort sa bite
Vincent Deumelemester ! Quelle surprise !
ton cousin va merveilleusement bien
comme une chaussette en soie dans un chausson en laine
ou comme
la langue rouge d'un schtroumpf noir dans le vagin blond de la schtroumpfette bleue
suis-moi BG !!
:) ;) :D
Deum répond qu’il veut bien le suivre
avec modération
pas trop d’élan
un enthousiasme proche de 0
la confiance au ras des pâquerettes
et que si jamais il se fout de sa gueule
et bah c’est pas cool
ouais non c'est pas cool
pas sympa
de se moquer comme ça
le chef de chantier tricératops
l’emmène au fond d'un des 346 bas-fonds de l’Open-Space
où il y a des tapis tribaux avec des géraniums
tendances suédoises
et du rap de Détroit
Deum Deum visualise son cousin
qui joue à la roulette russe
avec un pistolet à eau
en compagnie d'une collègue déguisée en tyrannosaure
il a déjà les cheveux trempés
Vivian ? Mais merde putain qu’est-ce que tu fous ?
Vivian le regarde
intensément
comme si Deum était une apparition de l'au-delà de la préhistoire d'une autre planète elle-même appartenant à un monde parallèle
puis il se reprend et balance une sauce verbale à deux balles
hey cousin ! Comment ça baigne???
je te présente Léana ma collègue préférée !
Léana Tyrannosaure se lève et tend sa patte atrophiée caoutchouteuse
à Deum
alors Deum lui sert sa patte rétrécie élastique et ça fait
flap flap flap
on dirait qu’il secoue un flan inconsistant
(silence gêné)
(Vivian fait une accolade à Deum Deum)
(il a une odeur à la fraise de clavier d’ordinateur)
ça fait plaisir de te voir !
dans l’immédiat Deum Deum s’interroge ouvertement
qu’est-ce que tu fous là un bras dans la terre t’a englouti jusqu'ici et maintenant tu sembles heureux comme une photo sur une briquette de lait au chocolat…
mais avant qu’il n'ait eu le temps
de terminer sa phrase
un gros tuyau rose
se décolle du plafond
en dégageant une forte odeur de pamplemousse et de jasmin
puis se place juste au-dessus de la tête flottante de Léana tyrannosaure
ensuite ouvre une trappe
enfin gobe Léana
qui n’a le temps de s’apercevoir de rien
c’est quoi ce gros bordel ?
s’étonne Deum Deum.
alors le chef de chantier tricératops
devenu un manager à la cool
lui explique décontracté
j’attrape des gens en passant mon bras
à travers la terre
ensuite je les traîne
pour qu’ils suivent une formation
stage
dans le but de co-animer et cool-faire
l’open monde de demain
et ainsi répondre aux enjeux macro-économiques
à l’aune des nouvelles méthodologies du thinking business bankable
dans une congruence d’outils roadmap adaptés et…
PAF Deum lui explose le PIF
et le sang saigne comme des étoiles filantes filent
sur la moquette jaune fluo néo-lactescente
et sur le pouf vert tropical moussaka d'Amazonie
et sur le bureau gris anthracite néo-orageux
et sur le clavier rétroéclairé pulpo-pépite de cerise
et sur le t-shirt de tricératops qui fait du surf sur le meilleur torse du meilleur boss du monde
et aussi sur le t-shirt de Vivian où un bonhomme patate dit
« J’ai la pêche »
(hihihi)
j’ai vraiment pas le temps pour ces conneries ineptes ça fait une plombe que je nage dans des amas de boue et que je croise des trucs pas nets alors maintenant tu te ramènes et on prend le large ça pue la fleur bleue ici et le cerveau en pot de bébé
non non j’ai pas trop envie, répond Vivian, je m’amuse bien ici
le meilleur boss du monde parle alors en avalant du sang disrupté
moi je vous laisse, j’ai un ping pong
alors Deum Deum se lance dans une grande tirade pour attendrir son cousin au moyen des mots comme ils sortent de son cœur tout guimauve antalgique
il a envie de lui expliquer que le monde ce n’est pas un tuyau rose qui emporte les gens
et que se déguiser en dinosaure n’est pas une solution à tous les problèmes
que la vie c’est comme un trou de souris il faut s’y glisser avec ingéniosité
qu’il y a toujours des pièges à rats pas loin avec du bon fromage
que la réalité possède des couloirs et derrière les couloirs des labyrinthes
que le monde cache bien son jeu dans sa manche
que les étoiles si lointaines et si minuscules doivent nous rappeler qu’on n’est pas moins minuscule même si on est plus proche
qu’un jour où l’on mange bien peut devenir un jour où l’on crève la dalle
que la merde attire les mouches pas parce que c’est dégueulasse mais parce qu’elles trouvent beau ce qu’on trouve dégueulasse
qu’on doit vivre chaque jour comme si c’était l’avant-dernier comme ça le dernier n’aura pas lieu
que les orangs-outans vont mourir étranglés par des pelleteuses malhonnêtes
qu'on ne doit jamais baisser les bras sauf si on porte des sacs plastiques lourds en revenant des courses
que l'amour triomphe toujours à part avec Hitler ou encore Pol Pot enfin en gros l'amour triomphe toujours
que l'argent ne fait pas le bonheur enfin ça aide beaucoup quand même mais pas que
que la souffrance il faut taper dessus jusqu'à ce qu'elle devienne bleue comme un joli ciel de montagne
que se gratter le cul n'est pas suffisant qu'il faut aussi se démanger le cerveau
enfin voilà on va pas plus non plus rentrer dans plein de détails
c'était l'occasion d'aborder tous ces sujets
souvent on n'a pas le temps ou on le prend pas et alors on se dit que c'est trop tard
le temps passe comme un haricot magique pousse